CONTRE LA LIBERTE SURVEILLEE ! LETTRE OUVERTE AUX PARTIS POLITIQUES de la part de LDH, MRAP, MAN, Comité citoyen albigeois
30 caméras de vidéosurveillance à Albi, c’est 30 de trop !
Alors que le nombre de crimes et délits connaît, en France, une baisse,le sentiment d’insécurité est en forte hausse. Telles sont les principales conclusions du rapport de l’ ONDRP (Observatoire National de la Délinquance et des réponses pénales), issu de l’enquête effectuée par des chercheurs du CESDIP(centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales).
Plusieurs facteurs expliquent cette montée du sentiment d’insécurité:
– La crise économique tout d’abord, qui génère déliaison sociale, fragilité et vulnérabilité.
– Le rôle des médias (pas seulement dominants) par leur traitement des faits-divers.
– L’instrumentalisation de ce thème par les politiques agents de l’idéologie sécuritaire.
La mesure de la délinquance doit devenir (enfin) scientifiquement crédible. En menant l’enquête directement sur 17000 ménages, à l’écart de la statistique policière, seule retenue habituellement par les commentaires médiatiques, les chercheurs du CESDIP ouvrent la voie. Ces résultats corroborent d’autres enquêtes comme celle menée en Ile-de-France.
Qu’en est-il à Albi ? Quelles études ont-elles été menées ? Par qui ? A partir de quelles données ? A quelle préoccupation correspond ce projet d’installation de 30 caméras ?
Un tel projet surprend nos concitoyens, d’autant plus qu’ils sont à même de prendre connaissance des bilans et autres études, effectués en France et à l’étranger, qui montrent que:
– La vidéosurveillance ne diminue pas la délinquance
– Elle n’accélère pas l’intervention en temps réel sur les lieux d’un délit
– Elle ne dissuade pas les actes délinquants
– Elle permet d’élucider des crimes et délits dans seulement 1 à 3% des faits sur la voie publique.
De piètres résultats pour un coût exorbitant: 20000 à plus de 30000 euros selon les spécialistes. A Albi on a avancé le chiffre de 400000 euros pour « un dispositif de 30 caméras » (?) En fait, cela coûtera combien ? Matériel, installation, maintenance, renouvellement….Et avec quel personnel ? Quelle qualification ? Quelle formation? La situation déjà aggravée par la Révision Générale des Politiques Publiques, « les relations police/population n’ont jamais été aussi détestables » note un syndicat de police en nov. 2012.
Nous avons besoin de policiers (gardiens de la paix) qui retrouvent leurs prérogatives de régulateur social, assurés d’une formation continue permanente, d’animateurs, de médiateurs quotidiennement présents, pas de caméras ! Nous avons besoin enfin d’une vraie politique de prévention !
Grande est la responsabilité politique des élus qui doivent se donner les moyens de mettre à disposition des citoyens les études existantes, d’organiser les débats publics, de faire échos aux témoignages et résultats venus d’autres villes voire d’autres pays et de lancer la réflexion sur ce paradoxe: baisse de la violence/hausse du sentiment d’insécurité. Il faut aborder la question des libertés individuelles et collectives, au présent, mais aussi, de façon prospective, en regard des évolutions technologiques. Il faut, enfin favoriser les apports de chercheurs des disciplines concernées: sociologie, technologie, droit….Un principe de justice veut que toute personne soit considérée innocente jusqu’au jour où il est établi qu’elle est coupable. La vidéosurveillance inverse la situation: toute personne filmée devra prouver qu’elle n’est pas en cause. Tout le monde devient fautif ou suspect potentiel et sous couvert du bien-être sécuritaire, les libertés reculent.
Seul un cheminement démocratique, comme celui-ci, pourrait permettre de tenir à distance et l’idéologie sécuritaire et l’électoralisme.
POUR UNE SOCIETE DE SOLIDARITE, NON DE SURVEILLANCE !
(1) Ligue des Droits de l’Homme, Mouvement contre le Racisme et l’Amitié entre les Peuples, Mouvement pour une Alternative non-violente