Lettre ouverte aux élus des communes de la CCTA

La Communauté des Communes Tarn Agoût travaille de nouveau sur le Schéma de Cohérence Territorial (ScoT) du Vaurais. Début juillet, un Projet d’Aménagement et Développement Durables (PADD) a été présenté. Il préfigure la rédaction du prochain Document d’Orientation et Objectifs (DOO) qui devrait clôturer cette procédure. En votre qualité d’élu communal, il nous semble utile de vous faire part de l’analyse que nous faisons de ce PADD. Cette analyse, détaillée ci-dessous est structurée autour de 4 parties :
  • Des orientations généreuses pour lesquelles nous attendons des moyens qui en donneraient quelques crédibilités.
  • Des oublis étonnant pour un document qui se veut orienté vers des perspectives de durabilité
  • Des hypothèses que nous jugeons douteuses dont les conséquences sont potentiellement dangereuses pour la ruralité de notre territoire.
  • Enfin, des argumentations obscures qui entretiennent une suspicion néfaste pour une concertation constructive.
Orientations généreuses Les principales orientations généreuses, nous les trouvons dans l’approche géographique et paysagères de cette étude (partie 2). La volonté affichée de protéger la qualité paysagère de nos espaces ruraux (l’identité rurale et patrimoniale du Vaurais), de favoriser les productions bio, de promouvoir un réseau modulable de transports collectifs sont autant d’intentions louables qui mériteraient quelques signe tangibles pour croire qu’il ne s’agit pas que de verbiages concédés à une écologie de façade. Pour exemple : la notion de Zone Agricole Protégée. Comme dans le précédent document, les ZAP sont inscrites dans ce PADD mais il n’y a toujours pas la moindre action définie. Pour l’heure, cette ZAP n’est qu’une coquille désespérément vide.Un leurre ? Oublis étonnants Malgré la terminologie de Développement Durable, le qualificatif durable apparaît secondaire dans ce PADD. Aucune allusion aux questions de transition énergétique, pas le moindre engagement en direction d’un plan climat-énergie territorial (PECT) à l’échelle de l’intercommunalité. Au rang des absents, notons également la culture. Il est pourtant manifeste que les équipements culturels sont des éléments structurants pour un territoire comme le notre (cinéma ?). Autres oublis, les équipements sportifs (piscine ?), le réseau internet et la question pourtant prévisible du vieillissement de la population. N’y aurait il pas besoin de réfléchir de façon concertée aux équipements qui seront nécessaires à la qualité de vie des aînés ? Hypothèses douteuses Au rang des hypothèses que nous jugeons douteuses il y a la projection démographique qui sert de base à cette étude (axe 3 de la partie 1). Nous y voyons une contradiction à l’ambition affichée de modération et d’équilibre de la croissance démographique. Prolonger une tendance n’est pas œuvre de prospective. Surtout quand cette tendance est généralement considérée comme une anomalie historique. Il est irresponsable de prendre comme repère un taux de croissance de 2 % par an au prétexte que nous avons connu presque 3 % par an il y a quelques temps. Comment peut-on croire que notre territoire connaîtrait une expansion démographique 6 fois plus importante que ce qu’il se passerait à l’échelle nationale ? Aucune raison de croire qu’il y aura un vaurai’s baby boom. Aucune envie de devenir une cité dortoir de la périphérie toulousaine. Autre hypothèse douteuse, l’afflux de 2 000 personnes aimantées par la création de la ZAC des portes du Tarn. Notre suspicion à l’égard de ce projet de ZAC ne faiblit pas. Ce n’est pas parce que ce projet est évoqué avec moult répétitions dans ce document qu’il gagne en crédibilité.Au delà de ces projections maximalistes, ce qui nous inquiètent, ce sont les conséquences qui en découlent. La prévision de consommation foncière se situe à un niveau particulièrement élevée. L’ambition de maîtriser l’artificialisation des terres agricoles ne nous parait pas suffisante : réduire de 25 % la consommation foncière n’est pas la marque d’une volonté. D’autant que la période de référence est celle où ont fleuri des projets immobiliers dont l’intérêt général semblait secondaire au regard de visées spéculatives de quelques uns. Au passage, notons que la ZAC des portes du Tarn s’octroie une part importante de cette consommation foncière. Le gigantisme de son emprise n’est toujours pas remis en cause bien qu’il expliquerait à lui seul plus du tiers de la disparition des surfaces agricoles du territoire. Argumentations obscures Nous avons relevé de nombreuses incohérences dans l’argumentation développée dans ce dossier. Ces incongruités posent question. Quelles soient volontaires ou pas, elles jettent un doute sur la qualité de la concertation qui est censée être mise en œuvre. Parmi les incohérences, il y a celles qui relèvent de calculs arithmétiques erronés. La plus cocasse est sans doute celle qui concerne le calcul de la consommation foncière. Au cours de la précédente décennie, cette consommation annuelle est-elle de 36ha (p 33) ou 32 ha (p34) ? Du coup, l’objectif de 24,4ha de consommation par an représente-t-il une baisse de 25 % par rapport à la période de référence ou 30 % comme l’affiche le document ? Ce chiffre de 24,4 ha est lui aussi assez énigmatique. Pourquoi ces 4 dixièmes ? Si au final il y a 490 ha consommés sur 20 ans, cela ferait 24,5 ha par an et non 24,4. D’ailleurs cette valeur de 490 ha intègre-t-elle 130 ha consommés par la ZAC (page 33) ou 176 ha comme le suggère le calcul 8,8 ha par an pendant 20 ans ? Et pourquoi 130 ha ou 176 ha pour la ZAC alors que son périmètre officielle est de 196 ha ? Au final difficile d’y voir clair sur un sujet pourtant central : l’emprise foncière. Dans le registre des incongruités mathématiques, nous relèverons aussi celle qui concerne le dénombrement de la population du territoire. Le précédent PADD validé le 6 janvier 2014 indiquait une population de 29 633 habitants (référence INSEE 2009). Ce nouveau PADD indique 340 habitants de moins 3 ans plus tard ! ( 29 293 habitants, INSEE en 2012) Cherchez l’erreur ! Si cela peut vous rassurer, il semblerait qu’elle se situe dans le document précédent. Pour ne pas alourdir le réquisitoire, nous ne détaillerons pas les interrogations que nous suggèrent aussi plusieurs calculs de pourcentages… Enfin, nous ne comprenons pas la cohérence du raisonnement qui consiste à ne pas traiter de façon uniforme des communes regroupées au sein d’une même catégorie. Certes l’armature territoriale a été simplifiée (exit « les pôles ruraux ») et c’est tant mieux, mais pourquoi dans le groupe « pôles relais », la commune de Labastide Saint Georges est-elle traitée de façon différente ? (p 18 : prévision du nombre de logements à construire). En conclusion, de notre point de vue, ce PADD soulève de nombreuses interrogations. L’enjeu n’est pas superficiel. Il s’agit de l’orientation que nous souhaitons donner à notre territoire pour les prochaines années. Se contenter de valider sans autre forme de débat un « travail d’experts » serait une faute. La démocratie a besoin d’argumentations contradictoires et de volonté d’approches participatives. Nous sollicitons votre sens civique pour engager un débat au sein de votre collectivité. Acceptez nos salutations respectueuses. Pour le groupe local Lavaur-Graulhet Europe Écologie les Verts Fanou MENA (conseillère municipale à Saint-Sulpice la Pointe) François RIVALS (conseiller municipal à Labastide Saint Georges)